Le mardi 17 septembre
2019, le ministre de l’Intérieur, la garde des Sceaux, le
ministre de l’Action et des comptes publics ainsi que le
secrétaire d’État auprès du ministre de l’Intérieur, ont
présenté, un «plan national de lutte contre les stupéfiants».
Voici le détail des 55 mesures du «plan national de lutte contre
les stupéfiants», selon le dossier de présentation communiqué
par le gouvernement :
Objectif n°1 : Amélioration de la
connaissance des trafics ainsi que du pilotage
stratégique au niveau national et à l’échelon
territorial
Mesure 1 : La mission de
recueil et de centralisation du renseignement
criminel, à des fins de partage entre les
services, figurera comme premier objectif des
Cross (cellules de renseignement opérationnel
sur les stupéfiants), qui seront implantées sur
l’ensemble du territoire et qui constitueront
les relais locaux de l’Ofast (office
anti-stupéfiants) ;
Mesure 2 : Une campagne de
fiabilisation des informations contenues dans
les logiciels de rédaction des procédures de la
police et de la gendarmerie sera entreprise afin
d’améliorer l’alimentation de la base
statistique nationale Osiris (Outil et système
d’informations relatives aux infractions à la
législation sur les stupéfiants) ;
Mesure 3 : Incarnation de son
rôle de chef de file, un pouvoir de
centralisation des informations recueillies sur
les affaires réalisées par l’ensemble des unités
en charge de la lutte antidrogue sera confié à
l’Ofast ; en contrepartie, ce dernier s’engage à
analyser et diffuser le renseignement vers
l’ensemble des services partenaires et
l’autorité judiciaire ;
Mesure 4 : Afin d’enrichir
mutuellement les analyses produites par les
services, une coordination des structures
d’analyse des différents ministères impliqués
sera mise en place, dans la perspective de
l’édition annuelle d’un état de la menace. ;
Mesure 5 : Une cartographie
unifiée et partagée de tous les points de deal
et des réseaux de distribution sur le territoire
national sera constituée ;
Mesure 6 : Parce qu’il est
complexe de parvenir à juguler l’emprise des
stupéfiants sur certains territoires, des études
actualisées d’analyse de l’évolution de la
consommation et de l’impact des trafics de
stupéfiants sur le fonctionnement de la société
seront engagées, en lien avec la Midelca
(mission interministérielle de lutte contre les
drogues et les conduites addictives) ;
Mesure 7 : Le pilotage
stratégique au niveau national de la lutte
contre les stupéfiants suppose un engagement
direct des ministres concernés par la
problématique ; un comité de pilotage
interministériel associant les ministres en
charge de l’Intérieur, de la Justice, de la
Santé, de la Défense, des Affaires européennes,
des Douanes, de l’Outre-mer sera constitué et
réuni une fois par an. Le secrétaire général à
la mer, qui assure la coordination des services
de l’État en mer, notamment pour le volet de
lutte contre les trafics de stupéfiants en mer,
sera associé à ce comité de pilotage ;
Mesure 8 : Les équipes en
charge de l’analyse des cybertrafics seront
renforcées ;
Mesure 9 : Développement des
CLCT (cellules de lutte contre les trafics),
co-présidées par les préfets et les procureurs
de la République, mises en place dans le cadre
de la sécurité du quotidien et qui s’intègrent
dans la mise en œuvre de ce plan.
Objectif
n° 2 : Intensification et rationalisation des
activités opérationnelles
Mesure 10 : Un plan de contrôle
des flux sur le territoire national sera établi
à l’échelle de chaque zone de défense et de
sécurité, sur tous les modes de transport, sur
une base trimestrielle ;
Mesure 11 : Les dotations en
capteurs Lapi (lecture automatisée des plaques
d’immatriculation) seront augmentées :
Mesure 12 : La détection et le
ciblage des conteneurs permettent d’obtenir des
saisies de gros volumes, qui réduisent l’offre
dans des proportions structurelles ; des
objectifs quantitatifs et qualitatifs seront
établis par l’Ofast sur une base annuelle ;
Mesure 13 : Une réflexion sera
engagée pour améliorer la surveillance du
vecteur postal ;
Mesure 14 : Les succès du
dispositif «pilotage renforcé de la lutte contre
les stupéfiants» à Marseille et Lille,
notamment, plaident pour sa duplication dans
l’ensemble des métropoles et l’intégration
systématiques des gendarmes et de la douane, en
prenant appui sur les Cross qui seront
multipliées afin de couvrir 100 % du territoire
national.
Mesure 15 : Invitation des
polices municipales, des bailleurs sociaux et
des sociétés de transport urbain au «pilotage
renforcé» afin qu’ils apportent des
renseignements sur les trafics ;
Mesure 16 : Le deal de rue
constitue un fléau pour un nombre croissant de
territoires, tant en centre-ville que dans les
quartiers périphériques ; afin d’associer la
population à la détection et au démantèlement
des points de vente, une plateforme unique de
signalement sera expérimentée pour recueillir
les informations utiles avant de les transmettre
à la Cross concernée ;
Mesure 17 : Une liste nationale
des «cibles d’intérêt prioritaire» sera établie
afin de concentrer les investigations les plus
lourdes sur elles ;
Mesure 18 : Des opérations de
dissuasion des clients à proximité des points de
vente seront engagées par une présence policière
accrue dans le cadre de la police de sécurité du
quotidien, en lien avec les municipalités
concernées ;
Mesure 19 : Un renforcement du
contrôle des «growshops» et de la détection des
cultures de cannabis en métropole et en
outre-mer sera demandé aux services opérant dans
les territoires les plus impactés ;
Mesure 20 : Le «plan mules»,
tel qu’il a été décliné dans le protocole du 27
mars 2019, signé par la garde des Sceaux, la
ministre des Outre-mer, la secrétaire d’État
auprès de la ministre des Solidarités et de la
santé, le secrétaire d’État auprès du ministre
de l’Intérieur, le directeur général de douanes
et des droits indirects, qui met en place un
plan de contrôle renforcé depuis la frontière
avec le Surinam, jusqu’en métropole, sera
reconduit et renforcé ;
Mesure 21 : Alimentation
exhaustive du Fnos (fichier national des
objectifs sur les stupéfiants) par tous les
services impliqués dans la conduite d’enquêtes
judiciaires relatives à cette thématique ;
Mesure 22 : Réinvestissement
des quartiers concernés par le trafic de drogue
après les opérations de démantèlement pour
prévenir la réappropriation de l’espace public
par les réseaux (rationaliser l’emploi des
forces mobiles — définition d’une stratégie de
reconquête avec les différents départements
ministériels et les municipalités) ;
Mesure 23 : Éloigner les
délinquants de leurs territoires par
l’utilisation des interdictions judiciaires et
le recours aux expulsions locatives ainsi qu’aux
reconduites à la frontière pour ceux qui
seraient en situation irrégulière. Les mesures
d’accompagnement permettant la mise en œuvre de
l’éloignement des délinquants pourront au
demeurant être soutenues par le FIP (fonds
interministériel de prévention de la
délinquance), conformément au projet de
stratégie nationale de prévention de la
délinquance (lire sur AEF info).
Objectif
n°3 : Accroître la lutte contre l’économie
souterraine en neutralisant les circuits de
blanchiment du trafic de stupéfiants
Mesure 24 : Contrôle des
commerces susceptibles de participer au
blanchiment sous l’égide des Codaf (comités
opérationnels départementaux anti-fraude) ;
Mesure 25 : Recentrage des GIR
(Groupes d’intervention régionaux) en priorité
sur la lutte contre l’économie souterraine ainsi
que la saisie des avoirs criminels dans les
affaires de trafic de stupéfiants ;
Mesure 26 : Priorisation des
actions visant à identifier et neutraliser les
circuits de blanchiment ;
Mesure 27 : Coordination des
différents programmes internationaux de lutte
contre le blanchiment lié aux trafics des
stupéfiants ;
Mesure 28 : Développement à
l’international du réseau informel d’échanges
d’informations «Police to police – Amon (Anti
Money Laundering Operational Network)» ;
Objectif
n° 4 : Renforcer la saisie des avoirs criminels
Mesure 29 : Systématisation des
enquêtes patrimoniales ;
Mesure 30 : Augmentation de
l’offre de formation en la matière ;
Mesure 31 : Renforcement des
réseaux spécialisés en matière de détection des
avoirs criminels ;
Mesure 32 : Automatisation des
remontées d’informations liées aux saisies des
avoirs criminels ;
Mesure 33 : Coordonner les
différents programmes internationaux de lutte
contre les avoirs criminels ;
Objectif
n°5 : Initiatives de coopération internationales
Mesure 34 : Renforcement de la
coopération avec les pays producteurs de
stupéfiants ou servant de zone de rebond ;
Mesure 35 : Développement de
l’échange de renseignements opérationnels avec
les services de sécurité du Maroc, d’Espagne et
des états de la zone caraïbe ;
Mesure 36 : Dynamiser la
coopération avec le Benelux ;
Mesure 37 : Mise en place d’une
équipe dédiée européenne en République
dominicaine ;
Mesure 38 : Renforcement de la
coopération stratégique et opérationnelle avec
la Chine et l’Inde dans le domaine des drogues
de synthèses et des NPS ;
Mesure 39 : Mise en place d’un
dispositif régional de coopération avec les
Balkans ;
Mesure 40 : Accroissement du
recours aux outils internationaux de coopération
;
Mesure 41 : Renforcement des
échanges avec Europol ;
Mesure 42 : Maintien d’une
présence forte et de l’influence française au
sein des organisations internationales (Europol,
etc.) ;
Mesure 43 : Positionnement du
Ceclad-M (Centre de coordination de la lutte
anti-drogue en Méditerranée) auprès de ses
partenaires européens et extra-européens autour
de la Méditerranée ;
Mesure 44 : Renforcement du
réseau des officiers de liaison en Amérique du
Sud et centrale ;
Mesure 45 : Évaluation de
l’action du Cifad (centre interministériel de
formation anti-drogue) dans les Antilles et en
Amérique latine ;
Mesure 46 : Amélioration de la
coopération internationale en matière de
blanchiment et de saisie des avoirs criminels ;
Mesure 47 : Renforcement de la
coopération avec les pays tiers en matière de
blanchiment, notamment les pays du Maghreb et
Dubaï ;
Mesure 48 : Renforcement du
réseau de coopération avec les pays
destinataires des avoirs criminels et
accompagnement de la mise en place d’une
plateforme d’identification et de saisies des
avoirs criminels au Maroc ;
Objectif
n°6 : Renforcer les capacités des services et
adapter les organisations
Mesure 49 : Mise en œuvre d’un
plan pluriannuel de renforcement des services et
unités chargés de la répression ;
Mesure 50 : Augmentation de
l’offre de formation dédiée à la lutte contre
les stupéfiants ;
Mesure 51 : Mise à disposition
des services d’enquête de moyens d’interceptions
des communications cryptées ;
Mesure 52 : Accroissement des
moyens budgétaires nécessaires pour acquérir des
outils de pointe dans le cadre des techniques
spéciales d’enquête ;
Mesure 53 : Augmentation des
budgets dédiés à la coopération internationale
en matière de partenariat stratégique et
opérationnel de lutte contre les stupéfiants et
le blanchiment ;
Mesure 54 : Renforcement des
dispositifs de détection, d’interpellation de
traitement et de dissuasion dans les aéroports
afin de lutter contre les réseaux de passeurs
aériens ;
Mesure 55 : Adaptation des
moyens juridiques assortis à la lutte contre la
criminalité organisée.
De
nombreuses mesures vont dans le bon sens, reste
à savoir si elles seront vraiment appliquées.
Néanmoins, il manque le plus important à mes
yeux le volet prévention. De plus, il n’est
toujours pas question d’aborder la question du
Maroc principale fournisseur de cannabis en
Europe.
Serge Lebigot